Pour vivre heureux, vivons égaux ! Comment l’égalité réduit le stress, préserve la santé malade et améliore le bien-être de tous

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Titre de l'ouvrage: 
Pour vivre heureux, vivons égaux ! Comment l’égalité réduit le stress, préserve la santé malade et améliore le bien-être de tous
Auteur(s) de l'ouvrage: 
Kate Pickett
Richard Wilkinson
Maison d'édition: 
Les Liens Qui Libèrent
Date de parution de l'ouvrage: 
Janvier 2019
Date de rédaction: 
Septembre 2019

 

 

Dans un livre précédent[4] les auteurs avaient rassemblé de nombreux travaux révélant que les problèmes sanitaires et sociaux sont plus courants dans les pays inégalitaires. L’accroissement des inégalités nuit aux sociétés, il dégrade la santé et le bien-être humain.

« L’épidémiologie, qui s’intéressent en priorité aux preuves statistiques pour identifier les causes des maladies, a développé un ensemble de critères permettant d’apprécier la probabilité pour qu’une relation soit de nature causale. Outre que la cause doit précéder l’effet, ces critères incluent la puissance du lien observé, (des niveaux supérieurs d’inégalité entraînent des performances encore plus catastrophiques) » p16.

Ce type de recherche ne s’applique qu’ « aux problèmes dotés d’un gradient social, c’est-à-dire ceux qui deviennent plus fréquents lorsqu’on descend dans l’échelle sociale » p17 . Mais le plus surprenant est que « l’inégalité affecte  la plus grande majorité de la population, et non pas seulement une minorité pauvre (..) Là où les disparités de revenus sont plus marquées, la population dans son ensemble souffre plus fortement de la compétition sociale et du déficit de confiance en soi » p18

 

Chapitre 1 Ceci n’est pas un livre de développement personnel

« Plus personne n’ignore que notre environnement physique contient des polluants et des cancérigènes dont il faut réduire la teneur si l’on entend faire reculer certaines pathologies ; nous avons plus de mal à accepter l’idée qu’il est urgent de s’attaquer aussi à la nocivité des  environnements émotionnels et psychologiques ». Ces environnements méritent autant d’attention publique et politique que l’air que nous respirons ( Voir le livre de F. Flahault , L’Homme déboussolée).

« Aujourd’hui dans nos sociétés développées, le principal élément qui détériore la qualité et l’expérience de vie est ce que  les psychologues appellent la « menace d’évaluation sociale » ; c’est-à-dire notre inquiétude quant au regard et au jugement des autres. Cela se traduit par une charge supplémentaire de stress, d’anxiété et de dépression, mais aussi par une dégradation de la santé physique, par un recours fréquent à l’alcool ou à la drogue pour tenter de chasser nos angoisses, enfin par le délitement de nos liens communautaires et amicaux » p28 « La proportion d’Américains souffrant d’un trouble d’anxiété sociale est passée, au cours des trois dernières décennies, de 2% à 12% » p31

Depuis quelque temps, les pays riches connaissent des taux élevés et croissants de troubles mentaux ; l’anxiété et la dépression sont les maladies les plus courantes. « Nous nous préoccupons de nos conditions matérielles parce que nous tenons à préserver notre dignité et que les comparaisons sociales nous angoissent » p36

L’amitié, c’est bon pour la santé « Nous sommes ensemble, mais séparés ». Les allemands parlent parfois de la vitamine B (B comme Beziehungen qui signifie relation)

 

Commentaire

Cette thèse de l’anxiété de l’évaluation sociale, de la phobie sociale dans l’origine des troubles mentaux est discutable. N’est-ce pas la détérioration du lien social par les contraintes de la vie économique et de ses conséquences sur notre environnement psychique, l’incapacité à construire notre individuation qui serait la cause principale de l’anxiété ? Le paragraphe intitulé « L’amitié c’est bon pour la santé » p41-43 confirmerait cette hypothèse alternative. On reste dans le paradigme classique de ce qu’est l’homme dénoncé par Fluhaut

 

Vivre dans des pays où règnent de grands écarts de revenus entre riches et pauvres nous expose davantage à l’anxiété du statut social : chacun, indépendamment de sa richesse objective, est plus inquiet du regard et du jugement porté sur lui. Cette menace de l’évaluation sociale, accrue par l’inégalité, semblent déclenché deux réactions opposées : le narcissisme (chapitre 2, le doute de soi) et l’autoglorification (chapitre3, la folie des grandeurs). Pour booster sa confiance, pour répondre à la phobie sociale on peut noyer son anxiété par l’alcool, les drogues, mais aussi se réfugier dans le consumérisme pour produire une image positive de soi (chapitre 4, les fausses solutions). Le chapitre 5 (la condition humaine) est consacré aux origines évolutives de l’anxiété sociale et à la place prépondérante qu’elle occupe dans notre psyché. Les recherches sur la plasticité du cerveau montrent que les principales différences d’aptitudes résultent de la position d’un individu dans la hiérarchie sociale bien plus qu’elles n’en sont la cause (chapitre 6, l’illusion de la méritocratie). Tous les marqueurs de statut social, ceux qui étoffent ou habillent les différences de revenus et de richesses, ont été développés pour maintenir visible une distinction de classe – au point que certains s’apparentent essentiellement à des tests qui permettent d’identifier les personnes propres à être dévalorisées ou exclues (chapitre 7 le comportement de classe). Le défi  est de parvenir à une réduction drastique des inégalités tout en nous dirigeant plus résolument vers des pratiques respectueuses de l’environnement (chapitre 8 La voie vers un futur viable). Au-delà de simples redistributions marginales de revenus, un futur viable passe par  ancrage plus profond du principe d’égalité dans la structure des relations sociales et notamment dans les entreprises (Chapitre 9 Faire advenir un monde meilleur)

 

Inégalité et soutenabilité pp303-308

Des écarts matériels plus marqués amplifient les différences de statut et nous conduisent à nous soucier davantage de l’impression que nous produisons sur les autres.

La publicité et le consumérisme se nourrissent de l’insécurité du statut.

L’insécurité et le doute de soi poussent les individus à rechercher le réconfort dans l’instinct de possession. C’est en cela que les cures de shopping peuvent paraître constituer une thérapie.

Si nous voulons combattre le consumérisme et l’empêcher de faire de plus amples dégâts dans nos portefeuilles et sur la planète nous devons faire reculer les inégalités qui intensifient la compétition pour les statuts.

Les habitants des sociétés égalitaires sont moins égocentrés et plus disposés à agir pour le bien commun (2 exemples p307)

Confrontées à une pénurie de ressources naturelles, les sociétés divisées  par de profondes inégalités  économiques courent un plus grand risque d’effondrement que les plus égalitaires (Selon le modèle mathématique « Dynamique homme-nature ». p308

 

L’évolution des inégalités sur le long terme pp315-320

L’exemple des Etats unis, mais aussi des pays asiatiques : ce sont moins les forces aveugles du marché que les processus idéologiques et politiques qui, sur longue période, ont joué le rôle déterminant dans la définition du mode de répartition des revenus.

Ce que reflète le revenu d’une personne donnée, c’est sa capacité à s’emparer d’une part plus ou moins grande de ce qui est produit collectivement. Les riches et les dirigeants de multinationales n’auraient jamais pu faire fortune s’ils avaient grandi dans des sociétés dépourvues de d’infrastructures et s’ils n’avaient pu compter sur une main d’œuvre  compétente et instruite.

 

 

[3] Voir le livre de F. Flahault , L’Homme déboussolée « Nous voyons bien que nous dépendons de la nourriture que nous mangeons, de l’air que nous respirons, l’alternance du jour et de la nuit : écologie physique ; il nous est cependant plus difficile de prendre conscience de l’écologie psychique dont nous dépendons. Pour passer de l’ontologie substantialiste à une ontologie relationnelle, il nous faut intégrer et assumer le fait que nous dépendons de toutes sortes d’aléas qui ne dépendent pas de nous. » p43.

[4] Pourquoi l’égalité est meilleure pour tous, Les petits matins, 2013